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Le syndrome du QT Long Congénital (QTL)

Document rédigé par l’équipe pluridisciplinaire du centre de référence pour les maladies cardiaques héréditaires (Paris), en collaboration avec des patients atteints de la maladie

Qu’est ce que la maladie ?

Le syndrome du QT long (QTL) congénital est une anomalie du rythme cardiaque qui se caractérise par un intervalle QT anormalement long sur l’électrocardiogramme (ECG, enregistrement électrique du rythme cardiaque), associé à des modifications de la morphologie de l’onde T. Le syndrome est associé au risque de survenue de pertes de connaissances, voire d’arrêts cardiaques, dus à des troubles du rythme ventriculaire graves. Ces évènements sont favorisés par l’activité physique ou sportive, l’émotion, un stress sonore, parfois par la prise de médicaments allongeant l’intervalle QT.

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Figure 1
Electrocardiogramme avec mesures des différents intervalles, dont l’intervalle QT (depuis le début de l’onde Q jusqu’à la fin de l’onde T). Il s’agit ici d’un sujet normal, avec intervalle QT de 360 msec.

 

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Quelle fréquence dans la population ?

La fréquence du syndrome est estimée actuellement à 1 sur 5000 naissances.

Le syndrome est un peu plus fréquent chez la femme que chez l’homme. Les troubles du rythme surviennent principalement chez les enfants et les adultes jeunes, et le syndrome du QTL représente une cause de plus en plus reconnue de mort subite dans cette population jeune. Quelques cas de mort subite du nourrisson ont par ailleurs été rapportés au syndrome du QTL.

 

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Quelle cause, quelle transmission ?

Le cœur est anatomiquement normal (notamment en échographie) et le dysfonctionnement est purement électrique.

La maladie est d’origine génétique et il existe 2 formes de transmission de la maladie (non liées au sexe) : l’une est dominante et représente 95% des cas, l’autre est très rare et récessive. Dans les formes autosomiques dominantes (syndrome de Romano Ward), cela signifie que le gène anormal peut se transmettre à la descendance avec un risque de 50% pour chaque enfant, et un risque équivalent pour les garçons et les filles. On observe cependant une légère prédominance féminine de la maladie qui s’explique par une distorsion de transmission en faveur des femmes. Dans la forme rare et récessive, les anomalies de l’ECG et les pertes de connaissance sont associées à une surdité congénitale (Syndrome de Jervell-Lange et Nielsen). Lorsque deux parents ont un premier enfant atteint du syndrome de Jervell-Lange et Nielsen, la probabilité pour eux de transmettre à nouveau la maladie est de 25% à chaque nouvelle grossesse.

Le syndrome du QT long résulte d’une anomalie de fonctionnement des canaux ioniques cardiaques due à des mutations dans les gènes qui codent pour ces canaux. Une dizaine de gènes ont été jusqu’à présent identifiés et codent dans la majorité des cas pour des sous-unités de canaux ioniques cardiaques. Les 3 gènes les plus fréquemment mutés sont KCNQ1 (ou KvlQT1 ou encore LQT1), KCNH2 (ou HERG ou encore LQT2), qui codent pour des canaux potassiques, et SCN5A (LQT3) qui code pour le canal sodique cardiaque. Les mutations de ces canaux ioniques sont responsables d’une altération de leur fonctionnement.

 

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Quels symptômes ?

Certains patients ne présentent aucun symptôme et la découverte de la maladie peut se faire à l’occasion de la réalisation d’un ECG systématique qui montrera un intervalle QT anormalement long. Lorsque le syndrome se complique de troubles du rythme, ceux-ci sont le plus souvent intermittents et peu fréquents. Il s’agit le plus souvent de malaises avec ou sans perte de connaissance, survenant dans des conditions particulières telles qu’un effort physique, une émotion ou à l’occasion de la prise de certains médicaments. Certaines pertes de connaissance s’accompagnent de convulsions. Les troubles du rythme peuvent parfois survenir la nuit et ils sont alors suspectés devant des pertes d’urines inexpliquées. Les symptômes peuvent survenir dès la naissance mais sont surtout fréquents entre 10 et 30 ans.

 

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Quels examens pour le diagnostic? Le bilan ?

Le diagnostic.

Le diagnostic repose sur l’analyse de l’électrocardiogramme (ECG) et se fait essentiellement par la mesure de l’intervalle QT, et l’intervalle QTc (QT corrigé en fonction de la fréquence cardiaque). L’intervalle QTc est considéré comme anormalement long lorsque sa valeur est > 440 ms. Il existe 10% des sujets génétiquement atteints avec un intervalle 400 De plus l’aspect de l’onde T peut être également anormale, et il dépend du gène muté.

La détection d’anomalies de morphologie de l’onde T par le Holter permet d’orienter la recherche de mutations vers un gène particulier.

Le Bilan

Le Bilan de la maladie comporte la recherche de troubles du rythme, par réalisation d’un Holter (enregistrement du rythme cardiaque sur 24 heures) et souvent aussi d’une épreuve d’effort. Une échocardiographie sera réalisée pour vérifier la normalité de la fonction musculaire cardiaque.

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Figure 2
Enregistrement Holter ECG permettant d’enregistrer des troubles du rythme ventriculaire rapide (Torsades de pointes) contemporains d’une perte de connaissance.
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Figure 3
Principales anomalies de morphologies de l’onde T correspondant aux 3 principales formes génétiques de syndrome du QTL.

 

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Quelle évolution ?

L’évolution est variable et difficile à prévoir. Le risque est la survenue de troubles du rythme, caractérisés par des salves de tachycardie ventriculaire polymorphe particulière appelées torsades de pointes, qui peuvent évoluer vers une tachycardie ou fibrillation ventriculaire.

Certains patients peuvent ne pas présenter de symptômes en l’absence de traitement. Néanmoins, on estime de 50% des enfants deviennent symptomatiques en l’absence de traitement entre la naissance et l’âge de 15 ans. Les pertes de connaissance surviennent majoritairement dans l’enfance, mais elles peuvent se produire également à l’âge adulte. Les patients qui ont présenté des syncopes ont un risque élevé de récidive et de mort subite en l’absence de traitement.

 

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Quel traitement contre les symptômes?

Le traitement bêta-bloquant doit être institué chez tous les patients symptomatiques car ils réduisent de façon importante et très significative la survenue des syncopes et de la mort subite. Dans la mesure où la 1ère manifestation de la maladie peut-être la mort subite (15% des cas), il est également recommandé d’instituer un traitement bêta-bloquant chez les patients asymptomatiques. En cas de récidive de syncope, ou dans certains cas particuliers, l’implantation d’un défibrillateur automatique peut être proposée. Cet appareil est placé chirurgicalement sous la peau sous la clavicule et est relié au cœur par une sonde. Il surveille en permanence le cœur et peut arrêter un trouble du rythme en délivrant un choc électrique.

Certains médicaments peuvent majorer l’allongement de l’intervalle QT et favoriser les troubles du rythme. Ils sont contre-indiqués et figurent sur une liste qui doit être en possession du patient en permanence. En cas de prescription médicamenteuse, il est recommandé de vérifier si le médicament présente un risque (voir la fiche du centre).

La compétition sportive est contre-indiquée. L’activité sportive de loisir pourra être autorisée dans certains cas et sous couvert d’un traitement bêta-bloquant bien conduit. (voir la fiche du centre).

Les hypokaliémies (insuffisance en potassium observée sur prélèvement sanguin) doivent être évitées ou corrigées car elles favorisent les troubles du rythme.

 

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Quel traitement pour prévenir l’évolution ?

Le traitement visant à prévenir les syncopes est le même que celui qui permet de prévenir la mort subite. Il est donc fondé sur la prise régulière du traitement bêta-bloquant, la contre-indication de la pratique sportive et l’éviction des médicaments qui allongent l’intervalle QT.

 

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Quelle surveillance?

Les patients doivent être suivis par un cardiologue au moins une fois par an. La réalisation d’un Holter annuel est préconisée. Il permet de vérifier que le dosage et l’efficacité du traitement bêta-bloquant sont satisfaisants. Il faut surveiller l’apparition de tout symptôme nouveau et signaler impérativement tout malaise ou perte de connaissance au cardiologue.

 

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La grossesse chez la patiente est elle possible ?

Le syndrome du QT Long ne contre-indique pas la grossesse, et il n’a pas d’influence sur la fertilité. Si l’un des 2 parents est atteint, le risque de transmettre la maladie au futur enfant est de 50% à chaque grossesse. Lorsque la mère est atteinte, le traitement béta-bloquant ne doit pas être interrompu. Il doit être poursuivi pendant la grossesse et le post-partum. Il n’y a pas de contre-indication à l’allaitement maternel avec les béta-bloquants. Du fait du risque d’hypoglycémie néonatale avec le médicament, et d’un possible syndrome du QT long néonatal, il est recommandé que les grossesses soient prises en charge dans des maternités habilitées à la prise en charge des grossesses à risque (niveau 2 au minimum).

 

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Quel bilan familial faut il faire ?

Du fait de l’origine génétique et du mode de transmission autosomique dominant, la maladie peut être transmise à la descendance avec un risque de 50% pour chaque enfant. Par ailleurs, la maladie a habituellement été transmise par l’un des deux parents du patient, et peut avoir été transmise à la fratrie de celui-ci. Ceci justifie la réalisation d’un bilan cardiologique (avec examen clinique et ECG) chez tous les apparentés au premier degré du patient (parents, frères et sœurs, enfants). Chez l’enfant, le bilan doit être débuté dès la période néo-natale et la mise en évidence du syndrome du QTL conduit à initier un traitement bêtabloquant dès cet âge, et à remettre la liste des médicaments contre indiqués.

Le risque de transmission du gène anormal à la descendance justifie par ailleurs une consultation de conseil génétique en cas de projet de grossesse, de façon à discuter du risque de transmission et des modalités de surveillance de l’enfant.

 

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Quel est l’intérêt du test génétique ?

Le test génétique consiste à faire une prise de sang (ou un prélèvement buccal chez le jeune enfant), extraire l’ADN, et rechercher l’anomalie génétique (mutation) responsable de la maladie dans la famille. Actuellement le test peut être proposé chez le propositus (premier malade diagnostiqué dans la famille) et une mutation est identifiée quelques mois plus tard dans près de deux tiers des cas. Le test génétique va ainsi pouvoir confirmer le diagnostic clinique. La nature du gène peut parfois apporter au cardiologue une information complémentaire sur le risque évolutif de la maladie, et orienter la stratégie thérapeutique. Surtout, l’identification de la mutation chez un patient donné va permettre de proposer le test génétique (dit prédictif) chez ses apparentés, de façon à identifier les porteurs et non porteurs de mutation, et donc pouvoir guider la surveillance cardiologique et la prise en charge thérapeutique au sein de la famille. Le test génétique prédictif peut se discuter dès la naissance.

 

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Documents joints

Article à télécharger (PDF - 327.8 ko)
Brochure patient QTL